29/12/2013
39° de fièvre au tableau d’affichage.
(…) Comme une grenade jaillit des barbelés, la mandarine décrivit une trajectoire par-dessus les fils de fer et vint rouler, sans éclater, sous la bottine du juge de touche. Celui-ci, engoncé dans un vieil anorak de campeur, le pantalon glissé à la diable sous une chaussette en tire-bouchon, évoqua davantage ces pionniers têtus qui propagent le rugby dans nos banlieues que les représentants duveteux dont nous gratifie à l’ordinaire le pays du tweed. On le prit donc pour un Français, un traître en somme, et pendant quelques instants ce fut un beau tollé, car cet individu placide brandissant un drapeau blanc qui n’était pas celui des capitulations en rase campagne s’employait sans raison apparente à annuler l’essai que venait de marquer l’équipe de France. Les Écossais étaient sur des chardons ardents, et ce qui ne manque pas de piquant aussi, ne comprenaient guère plus que nous.
Le remous des grandes colères offensives faisait onduler l’échine du public. On entendait des cris comme : « En avant ! » et je crus que la 5e division (tribune d’honneur) allait monter à l’attaque. Je tremblai un moment pour les « relations », ces fameuses relations franco-britanniques qui prennent un si bon tour, depuis quelque temps, puis le calme revint. On s’aperçut que le banlieusard n’était autre que M. Wilson de la Scottish Rugby Union (les voilà bien les trois points de Wilson), et qu’en définitive l’opération se soldait par un seul mort : le ballon [1].
Depuis près de cinq minutes, en effet, les joueurs, flanqués d’un directeur vif et cavaleur comme un écureuil, s’affairaient en de vains efforts à besogner un ballon mort, ce qui n’est pas bien ragoûtant, et l’on peut se demander ce qui se serait passé si l’essai refusé à Boniface n’était intervenu pour le ressusciter. À supposer qu’aucun coup de pied n’ait trouvé la touche ou que M. Elliot, trop occupé à épier la mêlée, n’ait pas songé à lever un œil vers ses auxiliaires, il est loisible d’imaginer que le reste de la partie se serait déroulé dans l’inanité et l’absurde. Pourquoi ne dote-t-on pas les juges de touche d’un sifflet qui leur permettrait d’adresser à l’arbitre un faire-part de décès ? La plus stricte intimité à laquelle on veut s’en tenir pour les choses du rugby engendre trop souvent de ces situations illogiques et injustes.
À part cet incident sans conséquence, ce match France-Écosse, disputé par un froid à ne pas mettre un kilt dehors, ne nous a donné que des satisfactions. Pour mon fait, je ne comprends pas pourquoi j’ai adhéré si tard à ce sport total ; il est vrai qu’un écart profond d’intérêt et de valeur intrinsèque me semble séparer le rugby international de celui qu’on peut déguster à l’étiage régional, du moins à Paris. Je n’ai pas à faire ici des réserves d’expert et je suis parfaitement satisfait des quinze joueurs de France, de Labadie à Vannier. On pourra regretter que celui-ci ait manqué quelques transformations faciles, mais comme dans l’ensemble c’est lui qui a paru transformé, nous n’y perdons rien. Et puis, peut-être un sort malin, des complicités impalpables, se conjuraient-ils pour que l’équipe de France ne marquât pas plus de quinze points : un point pour chacun, c’est la juste mesure d’un succès collectif.
Il me reste à féliciter les 30 000 bronchiteux, qui ont contracté le frisson fatal sur les gradins de Colombes pour applaudir trente gaillards, autorisés par privilège à se réchauffer à coups de claques dans le dos et de courses folles. Lorsque, sur les dribblings des avants écossais, Jean Prat criait : « Couchez-vous ! », je n’avais d’abord pas compris que c’était à nous qu’il s’adressait. En ce qui me concerne, en tout cas, c’est fait !
Et avec 39° de fièvre au tableau d’affichage.
Antoine Blondin : L’Équipe, 12 janvier 1955
[1] Contrairement à ce que pourraient croire les profanes, on ne dit pas qu’un ballon est mort lorsqu’il est égaré. Le ballon mort est un ustensile réduit à son enveloppe charnelle, mais privé d’âme et déserté par l’esprit de jeu. (Note d’Antoine Blondin.)
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24/12/2013
Cécile Corbel / La Fille Damnée
11:42 Publié dans Musique, Terroir | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cécile corbel
19/12/2013
Marianne Andrau - Les mains du Manchot
Marianne Andrau : « Les mains du Manchot »
NéO – Coll. Grands romans du merveilleux fantastique
1989 – 426 pages – 23 x 15 cms – 635 grammes.
Lu (tranche très légèrement incurvée et légèrement « talée » aux extrémités) mais avec grand soin, comme l’indique clairement cet exemplaire en très bon état, sain et propre (l’intérieur est parfait !), et ne « souffrant » (au final) que de quelques infimes marques de stockage en bordures de plats. Etat général = Bon+
Couverture illustrée par Jean-Michel Nicollet.
>>> 10 €uros. / disponible.
Quatrième de couverture :
En plein XXe siècle, une cité légendaire, Parsépol, dresse haut dans l'azur ses remparts de songe, au sommet d'un roc dénudé, quelque part entre Zagreb et Prague. Ville prodigieuse, hors de toute frontière, ville où rien ne ressemble à rien, où l'espace et le temps obéissent à des lois mystérieuses, où il suffit de penser une maison pour la voir apparaître, où les hommes et les femmes n'ont d'autre but que de cultiver leurs âmes jusqu'à la mort libératoire, Parsépol a pour Chef Suprême, Ax de Parsépol, également appelé le « Cerbe », qui est d'une grande beauté bien que son visage ne comporte ni bouche, ni nez, ni oreilles, mais un seul œil, énorme, à la lumière bleue. Il incarne la sagesse et d'ailleurs la langue des Parsépoliens ignore tout mot qui pourrait signifier mensonge, désordre, échec, erreur…
Un jour, un jeune savant, Jude Berguès, qui a consacré sa vie à étudier l'histoire de Parsépol, reçoit une convocation du « Cerbe ». Avec Zite, sa femme, nouvellement épousée, il abandonne tout pour répondre à cet appel, et franchit la porte invisible, gardée par deux monstres de pierre vivante, qui commande l'entrée de Parsépol. Mais, dès leur arrivée, ils seront séparés, car la cité est divisée en deux : la Main Droite où sont les hommes, la Main Gauche où sont les femmes… les deux Mains du Manchot.
Dès lors, le roman devient le récit de la rébellion de Zite et de l'initiation de Jude que le « Cerbe » désignera un jour comme son successeur…
Paru il y a près de 40 ans aux Editions Denoël, ce roman fut salué comme une révélation par les critiques les plus autorisés de l'époque (parmi lesquels Robert Kanters, Robert Kemp, Alexandre Vialatte, Claude Elsen, Jean Mistler, Henri Petit, Albert-Marie Schmidt, Dominique Arban), ce qui ne l'empêchera pas de n'être jamais réédité jusqu'à ce jour. Marianne Andrau publia ensuite trois autres chefs-d'œuvre romanesques : Le Prophète, P.C. (Down City) et L'architecte fou, ainsi que deux recueils de nouvelles : Lumière d'épouvante et Les faits d'Eiffel (Présence du Futur), tous chez Denoël. Incontestablement la plus grande romancière visionnaire française de ce siècle, Marianne Andrau, qui est aujourd'hui âgée de plus de quatre-vingts ans, n'a jamais cessé d'écrire, mais elle se consacre désormais aux essais plutôt qu'à la fiction. Nous comptons rééditer ses trois autres romans.
Ailleurs = 15 €uros chez Soleil Vert
Entre 10 et 13 €uros chez abebooks
13,20 €uros chez amazon.fr
17:38 Publié dans Fantastique, NéO / Nouvelles éditions Oswald | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : marianne andrau, les mains du manchot, nouvelles éditions oswald, néo, fantastique, jean-michel nicollet
05/12/2013
Le corbeau au fer à repasser...
Philippe Bouvard : Je ne vois pas ce que cette fable, Le Corbeau et le Renard, a de stupide…
Jean Yanne : C’est un très joli poème, je ne le conteste pas, mais pas très clair sur le plan de la vie animalière. Pour commencer, le corbeau et le renard ne possèdent pas de cordes vocales organisées, il est ainsi parfaitement stupide d’envisager entre eux la moindre conversation. Si encore il s’agissait d’un perroquet gris du Gabon… Ensuite, un corbeau, ça ne mange pas de fromage. Et surtout, un fromage, ça ne tient pas dans le bec d’un corbeau, je le sais, j’ai essayé. La configuration, du bec du corbeau ne lui permet pas ce genre d’excentricité. Ou alors il a vraiment fallu habituer le corbeau quand il était très jeune, en lui faisant d’abord tenir des apéricubes, puis des Vache-qui-rit, etc. Et même, en admettant qu’il puisse, au bout du compte, tenir un fromage entier, encore faut-il qu’il sache rester perché sur un arbre sans être déséquilibré par le poids dudit fromage, ce qui confine à l’impossible. Enfin, en faisant l’effort d’imagination de croire qu’un corbeau puisse tenir sur une branche avec dans le bec un fromage, que croyez-vous qu’il va faire, le corbeau, en voyant arriver un renard par l’odeur alléché ? Essayer d’entamer une conversation mondaine avec lui ou bien se barrer à fond de train, en abandonnant le frometon sur place ? Et pour finir, on ne voit pas comment un renard, qui est un carnassier de première bourre, irait emmerder un corbeau pour bouffer du fromage ! Il boufferait le corbeau et puis c’est tout ! D’autant que le corbeau est un animal délicieux, surtout avec un fer à repasser.
Philippe Bouvard : Avec un fer à repasser ?
Jean Yanne : Vous ne connaissez pas la recette du corbeau au fer à repasser ? Vous prenez un corbeau de deux ans, vous le plumez, vous réservez. Vous préparez un petit bouillon avec oignons, bouquet garni, sel, poivre, clous de girofle, cannelle, et tout un tas de petits légumes, carottes, navets, pommes de terre, etc… bref une petite nage, très intéressante. Ensuite, vous mettez le corbeau dedans avec un fer à repasser, et quand le fer à repasser est mou, vous mangez le corbeau.
( Extrait de : « Jean Yanne aux Grosses Têtes », Le Cherche Midi éditeur, 2005. )
17:33 Publié dans Détente, Humour | Lien permanent | Commentaires (0)
04/12/2013
Paulo COELHO
Paulo COELHO : « Le pèlerin de Compostelle »
En 1986, Paulo Coelho a entrepris le pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle, sur la route légendaire qu’empruntent les pèlerins depuis le Moyen-Âge. « A cette époque, dit-il, ma quête spirituelle était liée à l’idée qu’il existait des secrets, des chemins mystérieux, des gens capables de comprendre et de contrôler des choses défendues à la majorité des mortels. Je croyais que ce qui est difficile et compliqué mène toujours à la compréhension du mystère de la vie. »
De ce voyage véritablement initiatique, dont il relate ici les étapes, l’homme est sorti transformé : désormais convaincu que « l’extraordinaire se trouve sur le chemin des gens ordinaires », il s’est attaché, en tant qu’écrivain, à restituer dans un style simple, fluide, la richesse de notre réalité intérieure, dans le souci de partager son expérience avec tous.
Le pèlerin de Compostelle occupe une place privilégiée dans l’œuvre de P. Coelho. Il est le creuset de ses livres ultérieurs, et notamment de L’Alchimiste ; et l’auteur y expose aussi de façon très complète sa philosophie humaniste et la profondeur de sa quête.
Editions Anne Carrière / 1996 / Couverture souple.
20.5 x 13 cms – 326 pages – 390 grammes.
Bon tirant sur le très bon, quasi neuf : 5 €uros >>> 4 €uros. / Vendu !
Paulo COELHO : « La Cinquième Montagne »
« Au neuvième siècle avant notre ère, Dieu ordonne au prophète Elie de quitter Israël. Son chemin le mène alors à Sarepta, une petite cité phénicienne. Là, dans la ville assiégée par les Assyriens, Elie perdra tout, notamment la femme aimée, et sera pris dans un tourbillon d’événements dramatiques qui le conduiront à affronter Dieu.
- Pourquoi celui qui a créé le monde préfère-t-il se servir de la tragédie pour écrire le livre du destin ? demanda Elie.
- Tu ne sais pas ce que tu dis, rétorqua l’ange. Il n’y a pas de tragédie, il y a seulement l’inévitable. Tout a sa raison d’être : c’est à toi de savoir distinguer ce qui est passager de ce qui est définitif.
- Qu’est-ce qui est passager ?
- L’inévitable.
- Qu’est ce qui est définitif ?
- Les leçons de l’inévitable. »
Se fondant sur un fragment de la Bible (1 Rois,17 / 2 Rois, 2), Paulo Coelho développe les thèmes qui, depuis « L’Alchimiste » font la force de son œuvre : le sens que chacun doit donner à sa vie, la persévérance avec laquelle il faut suivre sa Légende personnelle, la nécessité d’espérer, et de comprendre que la tragédie faisant irruption dans une existence n’est pas une punition, mais un défi pour l’homme qui doit la dépasser…
Editions Anne Carrière / 1998 / Couverture souple.
20.5 cms x 13 cms – 313 pages – 373 grammes.
Quasiment « comme neuf « : 6 €uros >>> 4 €uros. / Vendu !
14:59 Publié dans Esotérisme / Occultisme, Philosophie, Religions / Spiritualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : paulo coelho, le pèlerin de compostelle, la cinquième montagne, philosophie, spiritualité, ésotérisme