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06/02/2014

6 février 1945

Le souvenir de Brasillach

 

Les gens qui cherchent aujourd’hui les écrivains de droite et ne les trouvent pas auraient intérêt à se rendre au cimetière. De même ceux qui nous demandent où sont nos maîtres…

Je ne pense pas que Robert Brasillach eût aimé s’entourer de disciples concertés. Il avait trop le goût des amitiés. Mais il y avait une leçon permanente à tirer de ses livres, de ses articles, de sa conversation, et c’était la leçon d’un cœur bien fait. Je dirai qu’il est peu de jours où ce cœur ne nous manque.

En réservant l’issue la plus virile à celui qui nous apprenait le sens des mots bonheur, légèreté, enfance, les destins ne se sont pas abusés : ils ont pris au sérieux, jusqu’à l’absurdité tragique une œuvre, une vie, en qui s’accomplissait l’alliance singulière de la grâce humaine et de l’engagement militant.

Je ne crois pas qu’il soit bien honnête, ni profitable, de se dissimuler que Robert Brasillach fut un homme politique. Ses romans de charme – au sens le plus envoûtant du mot – recouvrent une compréhension aiguë des époques et des cités, des mœurs et des éthiques. Il était éminemment de son temps, cherchant, avec quelle sympathie passionnée, à en dégager une mythologie qui portât encore quelque douceur de vivre. En revanche, il lui voulait un style. Sa politique, là-dedans, fut d’un alchimiste qui souhaite de donner au crépuscule les couleurs de l’aurore.

Cet appétit, cet art de transmuer les réalités conduisirent ce poète politique à faire une politique de poète, la plus valable à mon sens, la plus généreuse en tout cas. Et de même qu’il savait susciter et goûter les saveurs d’une civilisation en perdition, de même s’efforçait-il d’estimer ses ennemis qu’il appelait « ses adversaires fraternels ».

L’usage s’en perd. Il y a là aussi beaucoup d’enseignements à tirer.

C’est sous ce climat de tendresse pour le monde, sans mièvrerie, que je situe à jamais Robert Brasillach. L’éloignement exemplaire où l’a placé son assassinat ne dissipe pas la chaleur prochaine qu’il faisait rayonner autour de lui. Il peuple toujours certaines de nos rues et certains de nos moments.

Et pourtant, je ne l’ai vu qu’une seule fois. C’était pendant l’Occupation, à la terrasse du Flore. Jean-Paul Sartre passait sur le boulevard, fuyant vers une victoire certaine et confortable.

Il m’est arrivé de revoir Jean-Paul Sartre, entouré de jeunes camarades, assis comme nous l’étions ce matin-là, graves et captivés. J’en ai éprouvé comme d’un pincement. Ce n’est pas qu’il n’y ait places autour des guéridons pour toutes les jeunesses et toutes les écoles qu’on voudra, mais Brasillach…

Un maître, dites-vous ?

J’aurais bien aimé me promener avec lui.

 

Antoine Blondin : « Ma vie entre des lignes » 

 

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