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24/03/2012

Salammbô

Gustave FLAUBERT : « Salammbô »

 

Très certainement l’un des meilleurs romans d’Heroic Fantasy de tous les temps !

Et oui, vous avez bien lu, j’ai bien écrit : HEROIC FANTASY !!!…

Mais bon, que voulez-vous, les fans d’Heroic Fantasy ne lisent pas Flaubert…

Les « littéraires » qui lisent Flaubert ne lisent pas, voir ne savent même pas ce qu’est l’Heroic Fantasy… et de fait, personne ( hormis votre serviteur, qui passe – lui – allègrement de Burroughs à Mallarmé et d’Howard à Lamartine ) ne s’en est rendu compte !?! ( Hé! hé! )…

Mais croyez-moi sur parole, si vous êtes fan des Conan, Elric et autres John Carter… vous ne pourrez qu’adorer cette véritable saga, aux atmosphères à la fois baroques et « somptueusement barbares » ; quelque part entre la Dark Fantasy façon Moorcock et le sublime « 300 ». 

 

Club du beau livre de France / Collection « Les grands classiques ».

1954 / Limité à 3000 exemplaires ( celui-ci est le N°1819 )…

279 pages / 20 x 14 cms / 375 grammes.

Reliure cartonnée recouverte d’un tissu rouge. Monogramme bleu-vert sur premier plat, titre et nom d’auteur ( même couleur ) sur tranche.

Un léger « plat » en haut de tranche ( visible sur photo ), sans quoi très bon état général, intérieur sain et propre, lelle édition / bel exemplaire !

>>> 10 €uros. / Vendu !

 

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Ci-joint une chronique signée Fréneuse ( et empruntée au blog Plume – Errances littéraires ), illustrant à la perfection ma petite approche du dessus. Une chronique qui montre ô combien ce livre « étrange, mystique, violent et sensuel » peut être « déstabilisant » pour quelqu’un ne connaissant de Flaubert qu’au travers de ses « classiques » étudiés à l’école ; mais devenir un « spectacle chatoyant » pour tout amateur d’HEROIC FANTASY… qui l’aura immédiatement reconnu comme « sien », à la seule lecture de ces quelques mots !

 

On ne peut manquer d'être un peu décontenancé par le roman de Flaubert intitulé Salammbô. Après tout, on nous a toujours dit, d'un ton parfaitement didactique, que Gustave Flaubert était un grand écrivain réaliste et qu'il avait écrit Madame Bovary ou encore L'éducation sentimentale. A cela s'ajoute une mention au mythe du gueuloir, et souvent cela s'arrête là. Cette œuvre d'un tout autre genre existe, pourtant. Elle nous conte l'histoire de l'antique Carthage, à l'époque des guerres puniques.

Les mercenaires employés pour combattre Rome réclament leur solde et un conflit sans merci s'engage entre ces troupes de guerriers nomades et l'antique cité. Au centre, Mathô, chef des mercenaires lybiens et la fille d'Hamilcar, Salammbô.

Carthaginoiserie ou chef d'œuvre ? La critique contemporaine est divisée ; aujourd'hui encore, on hésite face à ce roman si difficile à caser dans un tiroir. Pour l'écrire, Flaubert s'est particulièrement bien documenté, se basant sur de grands noms de l'histoire gréco-latine : Pline l'Ancien, Polybe, Xénophon ou encore Plutarque.

Par ailleurs, le style de Flaubert semble très proche de la syntaxe latine, reflétant une conception de l'histoire et une langue d'un autre temps, friande d'énumérations, de brefs commentaires et d'analyses. Froidement, il décortique les évènements et les caractères de ses personnages, nous permettant d'approcher cette civilisation inconnue tout en maintenant une distance infranchissable entre elle et nous.

L'atmosphère de Salammbô est véritablement troublante, reflétant l'image d'une civilisation détruite et oubliée, d'un monde empli de religiosité et de mysticisme.

L'atout de cet étrange roman, c'est sa puissance d'évocation : Flaubert nous met devant les yeux un spectacle chatoyant et incompréhensible, beau et terrible à la fois. Certaines scènes sont particulièrement fortes, à l'image de ces mouvements de foule, empreints de frénésie, dans un élan à la fois violent et sensuel.

Il m'est assez difficile d'en parler plus précisément car, en plus d'être assez lointaine, cette lecture m'a assez fortement déstabilisée. J'ai été heureuse de découvrir un Flaubert que je ne connaissais pas encore, à travers cette drôle d'histoire folle et exotique.

 

( http://carnets-plume.blogspot.fr/2008/05/f-salammb-de-flaubert.html )…

 

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Extrait / Chapitre 8 – La bataille du Macar.

 

(…) A la droite et à la gauche des éléphants, voltigeaient les frondeurs, une fronde autour des reins, une seconde sur la tête, une troisième à la main droite. Puis les Clinabares, chacun flanqué d'un nègre, tendaient leurs lances entre les oreilles de leurs chevaux tout couverts d'or comme eux. Ensuite s'espaçaient les soldats armés à la légère avec des boucliers en peau de lynx, d'où dépassaient les pointes des javelots qu'ils tenaient dans leur main gauche ; et les Tarentins, conduisant deux chevaux accouplés, relevaient aux deux bouts cette muraille de soldats.

L'armée des Barbares, au contraire, n'avait pu maintenir son alignement. Sur sa longueur exorbitante il s'était fait des ondulations, des vides ; tous haletaient, essoufflés d'avoir couru.

La phalange s'ébranla lourdement en poussant toutes ses sarisses ; sous ce poids énorme la ligne des Mercenaires, trop mince, bientôt plia par le milieu.

Alors les ailes carthaginoises se développèrent pour les saisir : les éléphants les suivaient. Avec ses lances obliquement tendues, la phalange coupa les Barbares ; deux tronçons énormes s'agitèrent ; les ailes, à coup de fronde et de flèche, les rabattaient sur les phalangistes. Pour s'en débarrasser, la cavalerie manquait ; sauf deux cents Numides qui se portèrent contre l'escadron droit des Clinabares, tous les autres se trouvaient enfermés, ne pouvaient sortir de ces lignes. Le péril était imminent et une résolution urgente.

Spendius ordonna d'attaquer la phalange simultanément par les deux flancs, afin de passer tout au travers. Mais les rangs les plus étroits glissèrent sous les plus longs, revinrent à leur place, et elle se retourna contre les Barbares, aussi terrible de ses côtés qu'elle l'était de front tout à l'heure.

Ils frappaient sur la hampe des sarisses, mais la cavalerie, par-derrière, gênait leur attaque ; et la phalange, appuyée aux éléphants, se resserrait et s'allongeait, se présentait en carré, en cône, en rhombe, en trapèze, en pyramide. Un double mouvement intérieur se faisait continuellement de sa tête à sa queue ; car ceux qui étaient au bas des files accouraient vers les premiers rangs, et ceux-là, par lassitude ou à cause des blessés, se repliaient plus bas. Les Barbares se trouvèrent foulés sur la phalange. Il lui était impossible de s'avancer ; on aurait dit un océan où bondissaient des aigrettes rouges avec des écailles d'airain, tandis que les clairs boucliers se roulaient comme une écume d'argent. Quelquefois d'un bout à l'autre, de larges courants descendaient, puis ils remontaient, et au milieu une lourde masse se tenait immobile. Les lances s'inclinaient et se relevaient, alternativement. Ailleurs c'était une agitation de glaives nus si précipitée que les pointes seules apparaissaient, et des turmes de cavalerie élargissaient des cercles, qui se refermaient derrière elles en tourbillonnant.

Par-dessus la voix des capitaines, la sonnerie des clairons et le grincement des lyres, les boules de plomb et les amandes d'argile passant dans l'air, sifflaient, faisaient sauter les glaives des mains, la cervelle des crânes. Les blessés, s'abritant d'un bras sous leur bouclier, tendaient leur épée en appuyant le pommeau contre le sol, et d'autres, dans des mares de sang, se retournaient pour mordre les talons. La multitude était si compacte, la poussière si épaisse, le tumulte si fort, qu'il était impossible de rien distinguer ; les lâches qui offrirent de se rendre ne furent même pas entendus. Quand les mains étaient vides, on s'étreignait corps à corps ; les poitrines craquaient contre les cuirasses et des cadavres pendaient la tête en arrière, entre deux bras crispés. Il y eut une compagnie de soixante Ombriens qui, fermes sur leurs jarrets, la pique devant les yeux, inébranlables et grinçant des dents, forcèrent à reculer deux syntagmes à la fois. Des pasteurs épirotes coururent à l'escadron gauche des Clinabares, saisirent les chevaux à la crinière en faisant tournoyer leurs bâtons ; les bêtes, renversant leurs hommes, s'enfuirent par la plaine. Les frondeurs puniques, écartés çà et là, restaient béants. La phalange commençait à osciller, les capitaines couraient éperdus, les serre-files poussaient les soldats, et les Barbares s'étaient reformés ; ils revenaient ; la victoire était pour eux.

Mais un cri, un cri épouvantable éclata, un rugissement de douleur et de colère : c'étaient les soixante-douze éléphants qui se précipitaient sur une double ligne, Hamilcar ayant attendu que les Mercenaires fussent tassés en une seule place pour les lâcher contre eux ; les Indiens les avaient si vigoureusement piqués que du sang coulait sur leurs larges oreilles.

Leurs trompes, barbouillées de minium, se tenaient droites en l'air, pareilles à des serpents rouges ; leurs poitrines étaient garnies d'un épieu, leur dos d'une cuirasse, leurs défenses allongées par des lames de fer courbes comme des sabres, - et pour les rendre plus féroces, on les avait enivrés avec un mélange de poivre, de vin pur et d'encens. Ils secouaient leurs colliers de grelots, criaient ; et les éléphantarques baissaient la tête sous le jet des phalariques qui commençaient à voler du haut des tours.

Afin de mieux leur résister les Barbares se ruèrent, en foule compacte ; les éléphants se jetèrent au milieu, impétueusement. Les éperons de leur poitrail, comme des proues de navire, fendaient les cohortes ; elles refluaient à gros bouillons. Avec leurs trompes, ils étouffaient les hommes, ou bien les arrachant du sol, par-dessus leur tête ils les livraient aux soldats dans les tours ; avec leurs défenses, ils les éventraient, les lançaient en l'air, et de longues entrailles pendaient à leurs crocs d'ivoire comme des paquets de cordages à des mâts. Les Barbares tâchaient de leur crever les yeux, de leur couper les jarrets ; d'autres, se glissant sous leur ventre, y enfonçaient un glaive jusqu'à la garde et périssaient écrasés ; les plus intrépides se cramponnaient à leurs courroies ; sous les flammes, sous les balles, sous les flèches, ils continuaient à scier les cuirs, et la tour d'osier s'écroulait comme une tour de pierre. Quatorze de ceux qui se trouvaient à l'extrémité droite, irrités de leurs blessures, se retournèrent sur le second rang ; les Indiens saisirent leur maillet et leur ciseau et l'appliquant au joint de la tête, à tour de bras, ils frappèrent un grand coup.

Les bêtes énormes s'affaissèrent, tombèrent les unes par-dessus les autres. Ce fut comme une montagne ; et sur ce tas de cadavres et d'armures, un éléphant monstrueux qu'on appelait Fureur de Baal pris par la jambe entre des chaînes, resta jusqu'au soir à hurler, avec une flèche dans l'oeil.

Les autres, comme des conquérants qui se délectent dans leur extermination, renversaient, écrasaient, piétinaient, s'acharnaient aux cadavres, aux débris. Pour repousser les manipules serrés en couronnes autour d'eux, ils pivotaient sur leurs pieds de derrière, dans un mouvement de rotation continuelle, en avançant toujours. Les Carthaginois sentirent redoubler leur vigueur, et la bataille recommença.

Les Barbares faiblissaient ; des hoplites grecs jetèrent leurs armes, une épouvante prit les autres. On aperçut Spendius penché sur son dromadaire et qui l'éperonnait aux épaules avec deux javelots. Tous alors se précipitèrent par les ailes et coururent vers Utique.

Les Clinabares, dont les chevaux n'en pouvaient plus, n'essayèrent pas de les atteindre. Les Ligures, exténués de soif, criaient pour se porter sur le fleuve. Mais les Carthaginois, placés au milieu des syntagmes, et qui avaient moins souffert, trépignaient de désir devant leur vengeance qui fuyait ; déjà ils s'élançaient à la poursuite des Mercenaires ; Hamilcar parut.

Il retenait avec des rênes d'argent son cheval tigré tout couvert de sueur. Les bandelettes attachées aux cornes de son casque claquaient au vent derrière lui, et il avait mis sous sa cuisse gauche son bouclier ovale. D'un mouvement de sa pique à trois pointes, il arrêta l'armée.

Les Tarentins sautèrent vite de leur cheval sur le second, et partirent à droite et à gauche vers le fleuve et vers la ville.

La phalange extermina commodément tout ce qui restait de Barbares. Quand arrivaient les épées, ils tendaient la gorge en fermant les paupières. D'autres se défendirent à outrance ; on les assomma de loin, sous des cailloux, comme des chiens enragés, Hamilcar avait recommandé de faire des captifs. Mais les Carthaginois lui obéissaient avec rancune, tant ils sentaient de plaisir à enfoncer leurs glaives dans les corps des Barbares. Comme ils avaient trop chaud, ils se mirent à travailler nu-bras, à la manière des faucheurs ; et lorsqu'ils s'interrompaient pour reprendre haleine, ils suivaient des yeux, dans la campagne, un cavalier galopant après un soldat qui courait. Il parvenait à le saisir par les cheveux, le tenait ainsi quelque temps, puis l'abattait d'un coup de hache.

La nuit tomba. Les Carthaginois, les Barbares avaient disparu. (…)