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16/02/2012

Noir corbeau, mon ami voyageur...

Чёрный ворон ( Протяжная песня донских казаков ).

Noir corbeau ( Chant des Cosaques du Don ).


 

Noir corbeau, mon ami voyageur,
Où donc, si loin, as-tu volé ?
Noir corbeau, mon ami voyageur,
Où donc, si loin, as-tu volé ?

Où donc, si loin, as-tu volé ?
Toi, noir corbeau, tu m’as apporté,
Une blanche main baguée.

Une blanche main baguée...
Je suis sortie sur le perron,
Légèrement, j’ai chancelé.

Légèrement, j’ai chancelé...
Par la bague, j’ai reconnu de mon ami,
Sa main que tient le corbeau.

Cette main, la main de mon bien-aimé,
Sans doute, qu’à la guerre, il a été tué.

Sans doute, qu’à la guerre, il a été tué…
Mort, sur la terre, il est couché,
Dans un lointain pays étranger.

Dans un lointain pays étranger…
Est venu avec une pelle,
Un homme bienveillant.

Un homme bienveillant...
Dans une seule tombe, a enterré,
Deux cents quarante âmes.

Deux cents quarante âmes.
Une croix de chêne,
 il a planté
Et a Inscrit dessus :

« Ici reposent, des héros du Don,
Gloire aux cosaques du Don ! »
« Ici reposent, des héros du Don,
Gloire aux cosaques du Don ! »

 

Traduction : Sarah P. Struve.

12/02/2012

Jean-Paul Bourre : Vivre comme avant

30/01/2012

Les Amours Jaunes...

Tristan Corbière : Les Amours Jaunes

( 1958 / Jean Rollin )


 

Evocation de Tristan Corbière ( 1845 – 1875 ),

par le réalisateur Jean Rollin ( 1938 – 2010 ).

28/01/2012

Si l'enfer existe...

Si l'enfer existe, il doit ressembler de très près aux cages de la prison de New Orléans.

Jamais je n'aurais pu imaginer que l'Amérique, qui s'autorisait à vouloir donner des leçons de démocratie au monde, puisse accepter que ses prisons soient de tels ghettos dignes du nazisme et de véritables porcheries où l'homme est réduit à l'état de bête par des conditions de détention abominables. Trois dans une cellule minuscule et insalubre où la vermine grouille de partout. Une seule couverture aussi pouilleuse que le matelas. Pour toute porte, une grille de barreaux donnant sur un passage. Pas de lumière, sauf celle du couloir qui indirectement nous donnait un semblant de clarté la nuit venue.

Chaque jour nous étions groupés une trentaine de détenus dans une petite pièce qui servait de réfectoire. La nourriture y était immangeable. A table, chacun s'observait avec une tension nerveuse qui démontrait que l'on vivait sur une poudrière prête à exploser. La population pénale était en grande majorité composée d'hommes de race noire, quelques portoricains et très peu de blancs. Plus de 80% des nommes étaient drogués et regardaient autour d'eux avec des yeux fous injectés de sang. On y sentait une haine palpable et un racisme constant. J'avais sympathisé avec deux Colombiens. Le fait que je parle espagnol nous avait rapprochés. Ils étaient là pour trafic de faux dollars. Les bagarres éclataient pour un rien.

Deux jours après mon arrivée, j'y assistais à une bataille terrible entre deux blancs braqueurs de banque et trois noirs. Les gardiens intervinrent matraque à la main. Les deux blancs avaient perdu leur combat et ce furent pourtant eux qui se firent passer à tabac par ces geôliers vindicatifs qui ne voulaient pas se mettre à dos la population pénale noire. On était loin du respect des droits civiques que m'avait lu pompeusement le chef Poher.

Vers 19 heures, un chariot passait dans le couloir pour nous vendre du coca cola ou des cigarettes. C'était une haie de mains tendues et de cris poussés rageusement.

Un soir, j'entendis un hurlement bestial, puis des phrases criées en anglais. Il fallut attendre dix minutes avant que des gardes interviennent. Un noir venait de se trancher la gorge avec un couteau de sa fabrication. Je vis quelques instants après, les deux gardes qui le tenaient chacun par un pied et qui traînaient le long du couloir son corps moribond. Le sang qui lui coulait de la gorge laissait une trace gluante sur le sol cimenté. Un détenu vint avec une serpillière sale effacer la trace d'un tel barbarisme. J'étais écoeuré d'assister impuissant à une telle scène.

Oui, c'était aussi cela « l'Amérique »…

 

Extrait de « Coupable d’être innocent » / Jacques Mesrine.

( Édition France-Amérique, 1979 )

 

jacques mesrine,coupable d’être innocent

25/01/2012

Sparte et les Sudistes

Pour bien des gens, la disparition des qualités viriles, ou plus exactement leur dévaluation, n'est qu'un accident transitoire, qui n'est ni aussi désastreux qu'on le dit, ni aussi irréparable, ni aussi complet. Ils attestent les parachutistes qui leur ont fait grand peur et les astronautes qui leur inspirent une grande admiration. Je leur concède bien volontiers que le courage, les tireurs d'élite, et les recordmen n'ont pas tout à fait disparu du monde où nous vivons Je ne voudrais toutefois pas qu'ils se laissent prendre à ces apparences qui sont fort peu représentatives de notre tournure d'esprit. Et je souhaiterais qu'ils voient un peu mieux les conséquences de ce qu'ils ont accepté.

Car, d'abord, ce que l’aggiornamento de la civilisation nous invite à rejeter, c'est toute une partie instinctive, il faudrait presque dire animale de l'homme qui était, nous ne le comprenons pas assez, une de ses armes contre le machinisme et l'uniformisation.

Le courage, l'endurance, l'énergie, l'esprit de sacrifice même, sont chez l'homme des qualités de « bête », du robustes et primitives qualités de mammifères qui le classent parmi les animaux nobles qui survivent par leur force et leur intelligence. Je me demande si la loyauté, même, si étrangère aux animaux, n'est pas une de ces qualités pour ainsi dire biologiques : on naît avec une certaine noblesse dans le sang. Ces qualités tout animales ont fixé autrefois le classement des hommes. A l'origine des castes que toutes les grandes civilisations ont établies, il n'y a rien d'autre que leur existence et leur transmission. Ces qualités n'appartiennent pas exclusivement à ce qu'on appelle dans notre histoire la « noblesse d'épée ». Ce sont aussi les qualités des pionniers, celles des bâtisseurs de villes, celles des reîtres et des légionnaires : et ce sont aussi celles du peuple quand une cause ou une nécessité lui met les armes dans les mains. Il n'y a rien de grand dans l'histoire des hommes qu'on ait fait sans que ces qualités du sang y aient quelque part. Je ne vois que les premiers chrétiens qui les aient refusées, passagers parmi les hommes comme sur une terre étrangère, indifférents à tout sauf à ce qu'ils diraient devant leur Juge.

Cette part instinctive de l'homme, cette part animale de lui-même, le ramène sans cesse à lui et par là elle lui sert de défense, elle est même sa terre d'élection à la fois contre les dénaturations intellectuelles qu'on cherche à lui imposer et aussi contre le gigantisme et les cancers qui naissent de la civilisation industrielle. Elle lui rappelle sa vocation paysanne, sa vocation familiale, sa vocation de défenseur et de petit souverain de sa maison et de son champ, elle le remet à tout moment à « l'échelle humaine ». Et, par ce rapport et ce retour, elle le protège contre l'inondation qui naît périodiquement des passions des hommes, contre le déchaînement planétaire de la cupidité ou des idéologies. Nous avons tous en nous la barque de Noé, mais nous n'avons qu'elle.

C’est cet appel au plus profond de nous-mêmes qui a été brisé à notre insu en même temps qu'on dévaluait les qualités par lesquelles il s'exprime. Au contraire, le vainqueur dans la guerre de religion qui s'est déroulée est le pédantisme progressiste.

Il nous impose, pour commencer, une définition abstraite et rationnelle de l'être humain, il en déduit les croyances qui doivent alors logiquement s'imposer à tous et créer chez tous les hommes des réactions communes, il définit une conscience équipée et guidée artificiellement et pour ainsi dire, industriellement, et enfin, en application de ces croyances, il élabore les modes de vie que l'homme doit accepter s'il veut devenir un produit normalisé de la société industrielle, et aussi la mentalité qu'il doit acquérir pour être parfaitement dépersonnalisé et devenir l'homme grégaire dont une civilisation fonctionnelle a besoin.

C'est cette refonte totale de notre vie que la plupart des gens n'aperçoivent pas, car ils ne voient pas les liens entre ces deux domaines du pédantisme progressiste. L'uniformisation des existences leur paraît un effet inéluctable de la civilisation industrielle, l'alignement conformiste, un effet transitoire de la propagande. En réalité, ces deux résultats proviennent de l'application d'un même mécanisme de l'abrutissement, il s'agit dans les deux cas d'une rationalisation de l'être humain, qui porte sur la vie extérieure d'une part et sur la vie intérieure d'autre part, et qui a pour objectif le descellement, l'extirpation et la destruction de toute personnalité.

 

Extrait de : « Sparte et les Sudistes » / Maurice Bardèche.

© Pythéas, 1994 / ISBN 2-910082-00-8

 

Maurice Bardèche, Sparte et les Sudistes

22/01/2012

Poèmes de Fresnes

LE JUGEMENT DES JUGES

Ceux qu'on enferme dans le froid, sous les serrures solennelles,
Ceux qu'on a de bure vêtus, ceux qui s'accrochent aux barreaux,
Ceux qu'on jette la chaîne aux pieds dans les cachots sans soupiraux,
Ceux qui partent les mains liées, refusés à l'aube nouvelle,
Ceux qui tombent dans le matin, tout disloqués à leur poteau,
Ceux qui lancent un dernier cri au moment de quitter leur peau,
Ils seront quelque jour pourtant la Cour de Justice éternelle.

Car avant même de juger le criminel et l’innocent,
Ce sont les juges tout d'abord qu'il faudra bien que l’on rassemble.
Qui sortiront de leurs tombeaux, du fond des siècles, tous ensemble,
Sous leurs galons de militaire ou leur robe couleur de sang,
Les colonels de nos falots, les procureurs dont le dos tremble.
Les évêques qui, face au ciel, ont jugé ce que bon leur semble,
Ils seront à leur tour aussi à la barre du jugement.

Quand la trompette sonnera, ce sera le premier travail !
Mauvais garçons, de cent mille ans vous n'aurez eu tant de besogne
Pour tuer ou pour dérober vous n'aviez guère de vergogne,
Mais vous avez bien aujourd'hui à soigner un autre bétail
Regardez dans le petit jour, c'est le chien du berger qui grogne,
Il mord leurs mollets solennels, et le fouet claque à votre poigne.
Rassemblez les juges ici dans l'enceinte du grand foirail.

Pour les juger, je vous le dis, nous aurons sans doute les saints.
Mais les saints ne suffisent pas pour énoncer tant de sentences.
Ceux qu'on a jugés les premiers, autrefois, pendant l'existence,
Comme il est dit au Livre Vrai, ne seront jugés qu'à la fin.
Ils jugeront d'abord le juge, ils pèseront les circonstances.
A leur tour alors d'écouter l'attaque autant que la défense.
Les juges vont enfin passer au tribunal du grand matin.

Les tire-laine dans la nuit, les voleurs crachant leurs poumons,
Les putains des brouillards anglais accostant les passants dans l'ombre,
Les déserteurs qui passaient l'eau happés dans le canot qui sombre,
Les laveurs de chèques truqués, les nègres saoûls dans leurs boxons,
Les gamins marchands d'explosifs, les terroristes des jours sombres,
Les tueurs des grandes cités serrés par les mouchards sans nombre,
Avant d'être à nouveau jugés feront la grande Cassation.

On les verra se rassembler, montant vers nous du fond des âges,
Ceux qui, les raquettes aux pieds, parmi les neiges du Grand Nord
Ont frappé au bord des placers leurs compagnons les chercheurs d'or,
Ceux qui, dans la glace et le vent, au comptoir des saloons sauvages
Ont bu dans les verres grossiers, l'alcool de grain des hommes forts,
Et qui, négligents de la loi, confondant l'oubli et la mort,
Ont rejeté les vieux espoirs de gagner les tièdes rivages.

Ils s'assiéront auprès de ceux qui ont tiré dans les tranchées,
Et puis qui ont dit non, un jour, fatigués des années d'horreur,
Des soldats tués pour l'exemple et des décimés par erreur,
Et près des durs, des militants de toutes les causes gâchées,
De ceux qui tombent en hiver sous les balles des fusilleurs,
De ceux qu'enferment aux cachots les polices des Empereurs,
Et des jeunesses de partout par leurs chefs en fuite lâchées.

Oui, tous, les soldats, les bandits, on leur fera bonne mesure
Ne craignez pas, hommes de bien, ils seront jugés eux aussi.
Mais c'est à eux, pour commencer, qu'il convient de parler ici,
Car la parole est tout d'abord à ceux qui courent l'aventure,
Et non à ceux qui pour juger se sont satisfaits d'être assis,
De poser sur leur calme front leur toque noire ou leur képi,
Et de payer d'un peu de sang leur carrière et leur nourriture.

Les adversaires d'autrefois pour ce jour se sont accordés,
Les justes traînés au bûcher sont auprès des mauvais enfants,
Car les juges seront jugés par coupables et innocents.
Au-delà des verrous tirés qui d'entre eux pourra aborder ?
Qui verra ses lacets rendus, sa cravate et ses vêtements
Socrate juge la cité, Jeanne signe le jugement,
Et à la Cour siègent ce soir la Reine et Charlotte Corday.

Ils passeront, ils répondront, aux tribunaux des derniers jours,
Ceux-là qui avaient tant souci de garder leur hermine blanche,
Et les cellules s'ouvriront, sans besoin de verrou ni clenche.
À la cour du Suprême Appel, ce n'est pas les mêmes toujours,
O frères des taules glacées, qui seront du côté du manche.
Les pantins désarticulés attachés au poteau qui penche
Se dresseront pour vous entendre, ô juges qui demeuriez sourds.

Et ceux qui ont passé leurs nuits à remâcher leurs mauvais rêves,
Les pâles joueurs de couteau, les héros morts pour leur combat,
Les filles qui sur le trottoir glissent la drogue dans leur bas,
Ceux-là qui pendant des années ont perdu leur sang et leur sève
Par le juge et par le mouchard, et par Caïphe et par Judas,
Ils verront le grand Condamné. roi des condamnés d'ici-bas,
Ouvrir pour juges et jurés le temps de la grande relève.

Robert Brasillach

13 janvier 1945.

 

robert brasillach,poèmes de fresnes,le jugement des juges

13/01/2012

Un peu de culture...

Uropygienne

 

adj. f., du grec oura, queue, et pugê, fesse. Se dit d’une glande graisseuse qui se trouve au croupion des oiseaux, et dont la sécrétion sert à graisser les plumes.

Est-il plus plaisant spectacle que celui du cygne sauvage s’escagassant le fion d’un bec fouineur sur l’étang brumeux que le soleil levant redore au clair matin ! Croyez-vous que ce fringant palmipède se titille ainsi le sphincter dans l’espoir de quelques orgasmes à plumes ? Ou bien qu’il s’ébroue la houppette pour en chasser les poux d’eau qui s’accrochent à son duvet pour en sucer la moelle du penne * ?

Eh bien non ! Si notre cygne matinal se colle si joliment le nez au cul, c’est pour y ponctionner, sur le pourtour suintant de sa glande uropygienne, la grosse graisse grasse grise dont il enduira d’un bec sûr et léger son plumage éclatant que le soleil levant redore, au clair matin également. Ainsi oint, Coincoin pourra glisser sur l’onde avec cette grâce exquise qui n’existe pour ainsi dire pas chez le tuyau de plomb, et cela à l’abri du rhum de canard, si courant pendant le froid du même nom, et sans risquer de couler. Ce qui est fort important. C’est à sa parfaite insubmersibilité que le cygne sauvage doit sa légitime arrogance. On n’imagine pas un cygne couler. Ce serait aussi grotesque qu’un pape pétant au balcon un jour de Pâques. Dieu nous épargne semblables incongruités. Merci, mon Dieu. Caeli enarrant gloriam tuam.

Pour en revenir au trou du cul, évitons la grossière erreur, courante chez les gens du peuple, qui confondent souvent l’uropygienne et la caroncule, au risque de se ridiculiser dans les soirées mondaines où, Dieu encore merci, on ne les convie guère. La caroncule, qu’on se le dise, est à l’autre bout de l’oiseau, puisqu’il s’agit de ce machin ridicule que le dindon se laisse pendre sous le cou pour essayer d’avoir l’air plus con que le paon. Lequel criaille. Alors que le dindon glougloute. Parfaitement. Le dindon glougloute. C’est la poule qui glousse. Plus précisément, elle glousse pour appeler ses petits. Quand elle échange ses idées d’ordre général avec sa camarade de poulailler, ou qu’elle est sur le point de pondre, on dit qu’elle caquette. Alors que l’oie, non. L’oie cacarde. Pas le jars. Le jars jargonne. Alexandre Vialatte ajouterait que la caille carcouille, la huppe pullule et le loup glapit. C’était un homme fort cultivé, d’une prose infiniment élégante, d’un humour plus subtil, plus tendre et plus désespéré qu’un la mineur final dans un rondo de Satie. Alors que, pour en finir avec la basse-cour, les oiseaux porteraient plutôt l’intellect au ras de la glande uropygienne. Ce n’est pas Chaval qui me contredira.

 

( * Riche en azote et en sels minéraux ).

 

Pierre Desproges : Dictionnaire superflu  à l'usage de l'élite et des bien nantis. 

 

pierre desproges

10/01/2012

Pour le plaisir du verbe...

Frédéric Dard / San Antonio

 

- Mon cher maître, permettez-moi de vous présenter mon meilleur collaborateur, le commissaire San-Antonio.

Enfin, complémentaire :

- Maître Albéric Chemolle !

Dix doigts n'appartenant pas à la même main, comme l'écrirait Ponson du Machin, se gratulent énergiquement. Maître Chemolle est un puissant quadragénaire qui n'aurait aucune peine à mesurer deux mètres s'il avait huit centimètres de mieux. Il est puissant, noir de poil, débordant de tout, avec un air de vouloir paraître gentil qui mettrait sur ses gardes un mendiant aveugle. Sa lèvre est humide comme un sexe de vibro-massée. Ses joues tremblotantes ressemblent à de superbes fesses primées. Il porte de grosses lunettes à monture d'écaille et jouit de sourcils touffus comme en auront jadis les gens de la Ve République. Il débute chacune de ses phrases par une sorte de barrissement chargé, dirait-on de « faire un tympan » à ses auditeurs. Car chaque interlocuteur est pour lui un auditeur. Il apostrophe, tonitrue. Affirme. Assène. Partout il est en chaire. Sa vie est une tribune du haut de laquelle il se dit au monde médusé. Et il se dit entièrement en commençant par le superflu qui lui paraît être le plus urgent. Il sait que l'essentiel peut attendre puisqu'il est l'objet de la rencontre. Cet homme a deux langages : celui qu'il emploie pour parler des autres, et celui dont il use pour parler de soi. Il parle des autres en style télégraphique, ayant un minimum de salive à leur consacrer, économisant les épithètes, rognant sur les articles et les pronoms, sautant des verbes. Mais il fait montre d'une complaisance torrentielle pour parler de lui. Il se chérit, se surenchérit, déborde d'adverbes et de qualificatifs, chausse les pires pléonasmes, pilonne à coups de redites, souligne par des onomatopées.

- Entendu parler de vous, me dit-il. Excellent flic. Bravo…

 

Extrait de "Les Con" © Fleuve noir, 1973.

 

frédéric dard,san antonio

31/12/2011

Histoire de se mettre en appétit...

... un 31 décembre au matin.

25/12/2011

A Lovecraft Dream...